Au village de Cay Coq devant lequel nous sommes ancré, il n’y a ni eau courante, ni électricité. Il n’y a pas de voiture non plus. On se déplace à pied ou en bateau. Les enfants ont leurs pirogues, les grands des bateaux à voile qu’ils utilisent pour la pêche et se rendre à un autre village. Et pour aller sur le « continent », il y a les grandes barques colorées avec un gros moteur.
À voile, à moteur ou à rame.
Alors quand nous avons voulu aller à Madame Bernard, le grand village sur l’Ile à Vache, là où il y a le marché deux fois semaine et là aussi où se trouve Sœur Flora, nous avons fait comme tout le monde et avons chaussé nos souliers! Ou plutôt nos gougounes et nos crocs, car il y a bien longtemps que les souliers sont relégués au fond d’une cale!
Comme le marché a lieu les lundi et jeudi, nous avions pris rendez-vous avec Vilna pour le lundi afin qu’elle nous accompagne à Madame Bernard. Il y a bien sûr le marché là-bas, mais le but premier de notre visite là-bas était bien davantage d’aller rencontrer Sœur Flora. Enfin! Nous savons que l’argent que nous avons ramassé pour l’orphelinat s’est bel et bien rendu puisque nous en avons eu confirmation par courriel. Super! On quitte donc à 8h00, en compagnie de Vilna et aussi de Dave et Sarah, deux jeunes, un Canadien et une Allemande, du petit voilier Lizi Belle, et de Jonh aussi, un Texan qui avait pris la peine d’apporter des médicaments et des bandages pour le dispensaire de Sœur Flora.
Sur la route vers Madame Bernard… Routes, pistes, ce n’est pas le règne de la voiture ici, mais bien des pieds et des mulets!
Des petits villages et de petites maisons sur notre route
Sur la route, Vilna nous fait visiter sa maison. Très joli, cuisine extérieure, et elle a même un panneau solaire, pour la radio. Mais comme ils n’ont pas de batterie, elle ne peut avoir la lumière pour le soir.
Ouf, on nous avait bien dit qu’il fallait environ 1h15 à 1h30 pour se rendre à Madame Bernard, mais on constate que la route est bien longue dans les montagnes! On met bien plus de 1h30 pour s’y rendre, sans doute on s’est trop arrêté pour chercher des mangues et admirer le paysage…
On arrive enfin à Madame Bernard, un beau village de bord de mer, beaucoup plus grand que Cay Coq… et plus long que ne pensait, on ne finit plus d’arriver!
Et on arrive! À Madame Bernard, c’est jour de marché. On craignait un peu pour les enfants, c’est leur premier marché et les marchés sont toujours un peu déroutants avec tous les gens, les bêtes, les odeurs parfois fortes des poissons qui sèchent au soleil, la viande envahie de mouches… mais on n’a pas à craindre pour les enfants, ils sont bons! Julien aimerait même bien aller explorer à fond le marché!
Remarquez notre petite amie rencontrée au marché, elle nous suivra pour la journée et sera sur bien de nos photos! Et elle aime bien faire la pose!
Stationnement des chevaux et mulets!
Mais on laisse tomber le marché pour l’instant, on préfère se rendre directement à l’orphelinat. (On arrivera d’ailleur trop tard pour le marché à la fin et on reviendra les mains vides le soir venu!)
L’orphelinat, ainsi que le dispensaire et l’école de la Mission de Sœur Flora, sont tout en haut de la colline. À notre arrivée, Sœur Flora est occupée au dispensaire, mais bien vite, elle vient nous accueillir, toute petite Sœur Flora, toute petite mais si vive!
Et elle a de la parole à revendre! Immédiatement, elle nous raconte ce qui se passe présentement dans son univers, elle nous raconte des histoires, qui lui sont arrivées, qui sont arrivés à ses enfants, elle nous dit combien elle est inquiète d’Huguette, sa fille qu’elle a adopté alors qu’elle n’avait que deux jours et qui est maintenant malade depuis plus de 15 jours, hospitalisé à Port-au-Prince et soignée aux somnifères… Huguette qui s’occupait de l’administration, beaucoup plus de travail incombe à Flora, Huguette absente…
Et du travail, elle en fait beaucoup Sœur Flora! Malgré ses 72 ans, elle semble énergique comme une femme de 20 ans! En nous faisant visiter, elle nous parle de chacun des enfants, nous raconte leurs exploits, on voit bien qu’elle les aime tous profondément, chacun d’eux.
Une large part de l’orphelinat est dédié aux enfants handicapés, physiquement mais aussi mentalement. Parfois, lorsqu’elle va à l’hôpital avec un enfant pour un problème de santé ou un examen plus approfondi, elle se voit revenir avec deux enfants. Parce que les enfants lourdement handicapés à Haïti, personne ne sont là pour les prendre en charge, pour en prendre soin. Flora sait bien que si elle ne le prend pas avec elle, il mourra à l’hôpital. Alors elle l’amène et le prend sous son aile. Ainsi, toute une section de son orphelinat est dédiée à ces enfants que personne ne veut. Ils ont leur coin à eux, ont un centre de physiothérapie pour aider à leur stimulation physique, des hommes et des femmes s’assurent de leur bien être, ceux qui le peuvent vont à l’école, ses petits philosophes qu’elle les appelle! Et elle nous dit : « ne vous trompez pas, ils sont heureux! Ils sourient, ils sont couchés par terre, mais c’est là qu’ils sont bien! » C’est bien vrai, c’est mieux par terre à bouger comme ils le veulent que confinés à un lit ou un fauteuil.
Voilà ses petits philosophes!
Nous visitons aussi le dispensaire et les écoles. Et à la sortie des classes, les « ti-blancs », comme ils appellent Julien et Léa, sont bien populaires! C’est la foule autour d’eux! Les enfants ne veulent pas tant jouer avec eux que les voir, tout simplement! Et tout le monde joue jusqu’à ce que le monsieur de l’école vienne rétablir l’ordre et chasse tout le monde chez eux! « Oust! L’école est finie! »
Nous prendrons le diner avec Sœur Flora, jouerons avec les enfants de l’orphelinat et quitterons finalement vers 15h00 car, la route est longue pour le retour jusqu’à Cay Coq! Mais quelle belles rencontres, quelle femme formidable cette Sœur Flora, quelle œuvre indispensable. Nous avions entendus quelques commentaires, notamment de français impliqués à l’Ile à Vache, comme quoi Sœur Flora recevait maintenant beaucoup d’argent depuis que la compagnie de téléphonie la finançait, et qu’elle avait augmenté le prix des médicaments… Mais nous, ce que nous avons vu, c’est une femme qui donne tout, même sa vie, à ses enfants. Et pas seulement à ses enfants. Elle a réussi à faire installer un nouveau dessalinisateur beaucoup plus performant qui lui permet de partager de l’eau avec les villageois car, comme elle dit, si les fortes pluies causaient des diarhées à ses enfants, la même chose arrive aux enfants du village. Leur donner de l’eau pure évite bien des complications qui lui reviennent ensuite lorsqu’ils viennent la voir au dispensaire.
Et lorsqu’un feu de paille à une case a enflammé tout un îlet et détruit les habitations de tous les habitants, Sœur Flora les a nourrit car ils avaient besoin de manger, elle les a nourrit avec l’argent qu’elle avait. Et après, elle en trouvera d’autre pour ses enfants qu’elle nous a dit! « Je suis experte pour quêter! » qu’elle nous dit!
Alors Sœur Flora, elle est réellement exceptionnelle. Nous sommes extrêmement heureux de pouvoir lui donner ce petit coup de main financier par ce 5 000$ que nous lui avons remis. Et merci à tous ceux qui nous ont donné. Et autre petite anecdote : Jonh, le Texan, lui a aussi remis un billet de 100$. Elle a tout de suite su ce qu’elle allait en faire :
« Quand on sert du poulet aux enfants, on coupe toujours les cuisses en trois part. Quelqu’un me demandait pourquoi. Pourquoi? Parce qu’il n’en a pas assez pour tous les enfants. Mais quand on veut faire une fête, on donne à chaque enfant tout un os! Toute une cuisse de poulet et là, les enfants ils sont tellement content d’avoir chacun leur os (leur cuisse) qu’ils peuvent manger et gruger! On va acheter du poulet et faire une fête. »
Alors les enfants ont sûrement fait la fête mardi ou mercredi!
Et nous, au retour. Soeur Flora nous prêtera son bateau pour nous ramener. Merci beaucoup Soeur Flora. Que Dieu continue à veiller sur vous.
Beau voyage! J’espère que votre itinéraire vous amènera à Bequia (prononcé Beckway) C’est une des îles que j’ai aimée le plus. Encore sans touristes et pleine de beautés tropicales.
Située dans les Grenadines près de St Vincent.